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Vitamine D : êtes-vous sûr de bien couvrir vos besoins ?
La vitamine D est bien connue pour son action sur la santé osseuse. S’en tenir à cette seule fonction serait très réducteur. En effet, elle remplit d’autres missions tout aussi essentielles. Avoir un taux suffisant, ni trop ni trop peu, conditionne notre santé. En quoi est-elle importante ? Où la trouver ? Faut-il la consommer sous forme de complément alimentaire ? Comment savoir si nous en avons suffisamment ou si nous sommes en carence ?
La vitamine D, on en parle !
Elle est indispensable au fonctionnement de l’organisme. Elle suscite beaucoup d’attention et fait l’objet d’un bon nombre d’études ces dernières années. C’est une vitamine liposoluble, c’est-à-dire qu’elle se dissout dans les graisses. L’organisme peut la stocker, essentiellement dans le foie et les tissus adipeux. Une fois mise en réserve, elle est remise en circulation en fonction des besoins de l’organisme.
Vitamine ou hormone ?
Vitamine du fait de sa présence dans l’alimentation, elle est aussi perçue comme une hormone car elle est synthétisée par l’organisme. Une fois transformée sous sa forme active, elle devient un messager chimique. Transportée par le sang, elle est capable d’agir à distance de son site de production en activant des récepteurs spécifiques.
Une vitamine ou des vitamines D ?
Il existe 2 variantes : la D2 et la D3
- La D2 est d’origine végétale
- La D3 est synthétisée par la peau sous l’effet du soleil (d’où l’appellation vitamine du soleil). Il existe toutefois une vitamine D3 d’origine végétale issue du lichen boréal (régions froides comme la Scandinavie, le Canada, l’Irlande).
Pour être biologiquement actives, elles doivent être transformées dans l’organisme. Les 2 ont quasiment la même structure et au final la même activité, mais la D3 est mieux métabolisée avec une efficacité optimisée. C’est pour cette raison que lorsque l’on parle de vitamine D, on évoque la D3. L’apport endogène, via la peau, doit représenter environ les 2/3, l’alimentation venant compléter le 1/3 restant.
Les conditions d’une transformation optimale
Quelle que soit la source, les intestins, le foie, les reins sont les partenaires incontournables pour rendre actives les molécules issues des 2 variantes : les transformer en calcitriol. Ils doivent donc bien fonctionner.
Sous l’effet du soleil, le précurseur du cholestérol contenu dans les cellules profondes de la peau est transformé en « D3 native ». Celle-ci est ensuite de nouveau modifiée dans le foie et les reins et devient du calcitriol.
Lorsqu’elle est ingérée, elle doit passer la barrière intestinale pour être acheminée au foie pour une première transformation. Elle prend alors la forme dite « circulante » : elle circule dans l’organisme et gagne les reins pour y être transformée en forme active (calcitriol) en fonction des signaux indiquant des besoins. C’est la forme circulante qui est dosée lors d’un prélèvement sanguin.
A noter que le magnésium est nécessaire à son activation.
Quels rôles joue-t-elle ?
La minéralisation osseuse
Pour la formation et la préservation des os. Elle permet la fixation des minéraux comme le calcium et le phosphore au niveau de l’os et joue un rôle majeur dans la prévention du risque de déminéralisation, dans la prévention contre l’ostéoporose et le risque de fracture. C’est la vitamine antirachitique. En effet, une carence peut entraîner des troubles de la croissance.
La santé dentaire
La vitamine D assure une bonne minéralisation de l’émail.
La croissance et le renouvellement des cheveux
Une carence en vitamine D peut entraîner leur chute, avec fragilisation des follicules pileux empêchant leur repousse.
La vitamine D régule le taux de calcium et de phosphore
En effet, elle permet de réguler le taux de calcium et de phosphore dans le plasma sanguin, l’équilibre phosphocalcique étant important pour de nombreuses fonctions. Cette régulation se fait de trois façons différentes :
Via l’intestin
S’il n’y a pas assez de calcium dans le sang, la vitamine D peut puiser le calcium présent dans les intestins pour le diriger vers le plasma.
Via les reins
En agissant sur l’excrétion urinaire.
Via les os
Par le biais de la résorption osseuse. L’organisme puise dans les réserves osseuses pour combler les manques. Il y a là un risque pour la santé des os. La vitamine D joue donc un rôle dans la minéralisation et déminéralisation au niveau osseux. Il est nécessaire d’avoir, de manière générale, une bonne couverture des besoins phosphocalciques.
Des fonctions extra-osseuses
La vitamine D intervient dans :
La différenciation cellulaire
Dans le processus de développement des cellules et de leur spécialisation dans une fonction déterminée. Selon les besoins, la cellule nouvelle rejoint tel ou tel système.
L’immunité
Elle protège des infections hivernales en stimulant les cellules de l’immunité. Elle intervient aussi dans la préservation de la muqueuse intestinale, au niveau des jonctions qui empêchent les pathogènes de la traverser et de passer dans la circulation sanguine.
La régulation de l’insuline
Elle améliore la sensibilité et l’insulino-résistance, en lien avec le diabète.
Le bon fonctionnement musculaire
Au niveau des contractions et renouvellement des fibres musculaires.
Des recherches tendent à démontrer d’autres implications
Certaines zones du cerveau, en lien avec les fonctions cognitives, disposent de récepteurs de la vitamine D. Cela pourrait expliquer le lien entre un taux plasmatique bas et le déclin des fonctions intellectuelles. Chez la femme enceinte, elle permettrait de mieux réguler la glycémie et la pression artérielle ainsi que le risque de prééclampsie. Elle permettrait par ailleurs le bon développement du cerveau du bébé pendant et après la grossesse. Ces pistes restent encore à explorer.
Des études font état d’une possible protection contre certains cancers. Elle inhiberait les cellules cancéreuses, notamment pour les cancers du sein, colorectal, de la prostate. L’incidence de ces cancers serait plus élevée en présence d’un faible taux de vitamine D circulante. Cette implication reste discutée. Au-delà des constatations, on reste dans l’attente de preuves scientifiques.
Carences, excès d’apport : quels sont les risques ?
Les déficiences impactent les fonctions pour lesquelles elle est essentielle, selon ce qui est précité. La déminéralisation osseuse peut avoir des conséquences à tous les âges. Chez les enfants pour leur croissance et pour éviter une déformation de leur colonne vertébrale. Chez les adultes et les séniors en prévention de l’ostéomalacie (manque de dureté des os qui deviennent déformables) et de l’ostéoporose.
Puisqu’elle agit au niveau musculaire, on peut craindre une baisse du tonus musculaire, des crises de tétanie, des crampes. Peau sèche, fatigue, perte de cheveux peuvent aussi résulter de potentielles carences. A l’inverse, l’excès (hypervitaminose) amène une concentration de calcium trop importante dans le sang, avec pour conséquences :
- Une hypercalcémie (calcification des tissus) potentiellement dangereuse pour le système cardio vasculaire et rénal
- Des maux de tête
- Des nausées et vomissements
- Une forte fatigue
- Une perte de poids
- De la constipation
- Le risque d’excès est assez rare.
Les personnes à risque
Les personnes âgées
Les capacités de l’organisme pour synthétiser et absorber la vitamine D diminuent.
Les enfants
Avec leur peau fine et fragile, leur exposition au soleil doit être limitée et leur alimentation ne couvre pas la totalité des besoins.
Les femmes enceintes
D’une part, elles s’exposent généralement peu au soleil, d’autre part le statut en vitamine D du fœtus dépend de celui de la mère, d’où le risque de carence qui pourrait perturber la minéralisation osseuse du bébé.
Celles qui ne prennent pas le soleil
Peau intolérante, maladies, coutumes religieuses imposant le port de vêtements très couvrants, etc.
Les personnes à la peau foncée
Plus la peau est pigmentée et riche en mélanine moins elle synthétise la vitamine D. Il faut une exposition 3 à 5 fois supérieure pour une synthèse équivalente.
Les personnes végétariennes et végétaliennes
L’exclusion des viandes (abats, foie), poissons, œufs, produits laitiers étant une source alimentaire importante.
Les personnes prenant certains médicaments
Antiépileptiques, corticoïdes, anti VIH, anticonvulsifs…
Les personnes ménopausées
Avec l’avancée en âge, la synthèse par la peau est plus faible.
Les personnes souffrant de troubles intestinaux
Ils entrainent une mauvaise absorption de la vitamine D
Celles qui sont en surpoids
Les études tendent à établir une corrélation entre un faible taux de vitamine D circulante et l’indice de masse corporel. Il n’est toutefois pas encore établi si c’est la carence en cette vitamine qui peut causer le surpoids (ce qui permettrait de penser qu’une supplémentation pourrait réguler le poids), ou si c’est le surpoids qui impacte négativement le taux de vitamine.
Quels sont les besoins ?
La synthèse endogène, fabriquée par l’organisme, est la principale source. Elle dépend du type de peau et bien sûr, du temps passé en plein air, de la latitude, de la saison, de l’âge ainsi que de l’usage de crème solaire.
L'exposition solaire préconisée est de 10 à 15 min sur les bras, les jambes, les mains, le visage, au moins 3 fois par semaine, mais ce temps d’exposition doit être adapté à chacun. L’apport alimentaire représente environ entre 10 et 20 %.
Le déficit est fréquent sous diagnostiqué et touche environ plus de 40 % des personnes de plus de 50 ans dans les pays occidentaux. Il est d’autant plus élevé dans les pays où l’ensoleillement est important (port de vêtements couvrants : protection, religion, traditions). En France, selon l’ANSES, en 2019, 70 % de la population était en déficit.
Les recommandations sont données en Ui (unité internationale) ou en µg (microgramme), l’équivalence étant de 1 µg = 40 Ui. Les apports nutritionnels quotidiens recommandés sont de :
Quelles sont les sources alimentaires ?
- 400 Ui pour les nourrissons (10 µg)
- 600 Ui pour les enfants et adultes (15 µg)
- 800 Ui pour les plus de 60 ans (20 µg)
Les apports quotidiens réels seraient de l’ordre de 3 µg
.
Aliments | Portion | Vitamine D (UI) |
Saumon sauvage | 100 g | 600 - 1 000 |
Saumon d'élevage | 100 g | 100 - 250 |
Sardine en conserve | 100 g | 300 - 600 |
Maquereaux en conserve | 100 g | 250 |
Thon en conserve | 100 g | 236 |
Huile de foie de morue | 1 cuillère à soupe | 400 - 1 000 |
Champignons shiitake frais | 100 g | 100 |
Champignons shiitake séchés | 100 g | 1 600 |
Jaune d'œuf | par jaune | 20 |
Champignons frais (Suisse) | 100 g | 76 |
Beurre | 100 g | 52 |
Fromage Emmental | 100 g | 44 |
Quelles sont les valeurs de référence pour le dosage sanguin ?
Le dosage consiste à mesurer le taux de la vitamine qui circule dans le sang et qui constitue « le stock » dans l’organisme. Elle est identifiée sous la formule 25(OH)D. Les unités de mesure sont exprimées soit en nanogramme/millilitre : ng/ml, soit en nanomole : nmol/L
Il n’y a pas de réel consensus sur les valeurs de référence. Toutefois, la tendance est fixée à 75 nmol, ou 30 ng/ml, pour une prévention de la santé osseuse. Des valeurs inférieures traduisent des déficits plus ou moins importants :
- carence grave (taux <25 nmol/L ou <10 ng/ml)
- carence (taux de 25 à 50 nmol/L ou 10 à 20 ng/ml)
- insuffisance (taux >50 mais >75 nmol/L ou >20 mais > à 30 ng/ml)
A qui s’adresse le dosage de la vitamine D ?
Il y a 6 situations cliniques pour lesquelles le dosage est recommandé et remboursé :
- suspicion de rachitisme
- suspicion de déminéralisation osseuse
- transplantation rénale
- chirurgie bariatrique
- personnes âgées sujettes aux chutes répétées
- prise de certains médicaments
Néanmoins, en cas de doute, chacun peut faire réaliser un dosage sans ordonnance, dont le coût peut varier de 12 à 20 € environ.
En cas de déficit avéré, une supplémentation doit être prescrite. En cas de doute sur son statut en vitamine D, mieux vaut éviter de faire de l’auto- supplémentation à l’aveugle, car il peut y avoir un risque de surdosage, ou de sous dosage. La mesure sérique doit toujours servir de base pour ajuster la prise complémentaire, qui peut aussi être accompagnée par quelques nouvelles habitudes sur le plan alimentaire.
La surveillance est essentielle chez les séniors, pour qui un contrôle est conseillé une fois par an. Il est démontré qu’un taux suffisant protège d’environ 30 % des risques de fracture de la hanche, de 34 % des risques de chute, de 14 % des risques de fracture non vertébrales. La vitamine D étant liposoluble, il est recommandé de la prendre au cours des repas pour favoriser son absorption. Elle existe sous différentes formes :
- en comprimé, mais l’absorption n’est pas toujours optimum
- associée à d’autres compléments, mais certains soulignent alors le risque qu’elle soit sous dosée ou surdosée
- en gouttes, qui semble être la forme la plus adaptée
La prise peut être quotidienne ou à plus forte dose, mensuelle, trimestrielle… Les avis sont partagés mais il semblerait qu’ingérer une dose importante pourrait gêner le foie et les reins.
Le dosage n’est réservé que pour des raisons de suspicions pathologiques, ou pathologies avérées. Il est néanmoins admis qu’un déficit est très courant au sein de la population, et notamment en hiver. Compte tenu des fonctions osseuses et extra osseuses de la vitamine D, de ses conséquences soupçonnées en cas de déficit pour un certain nombre de pathologies, un contrôle en cas de doute paraît utile.
Si chacun peut décider de son bilan sanguin, mieux vaut se faire conseiller pour bien se supplémenter. Rappelons que la vitamine D2 d’origine végétale peut être la solution pour les végans.